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Capital

André Rieu, l'homme qui fait valser les millions !

11 millions de CD, 110 concerts par an... le violoniste fait mieux qu’une pop star
                                            Le musicien emploie 120 salariés et possède cinq bus, huit camions et deux avions

Ce Hollandais a trouvé un filon: il vulgarise la musique classique. Et en a fait une industrie. Il produit lui-même ses disques, gère ses tournées... en artiste de la rentabilité

Aux premières notes du «Beau Danube bleu», les spectateurs se lèvent.  Des femmes en robe longue souriant à leur mari en habit, des couples septuagénaires rosissant de timidité, des bandes de copines pouffant de rire... Beaucoup entament une valse dans les travées du Zénith.  En ce mois de janvier pendant six soirées affichant complet, le violoniste André Rieu transforme une fois encore le temple parisien du rock en salle de bal viennoise. «La première fois qu'André a joué ici, nous avions recruté seize danseurs pour lancer le mouvement.  Maintenant, le public s'y met spontanément», raconte Pascal Guillaume, directeur de production chez Glem, l'organisateur français.  Inconnu lors de son premier passage à l'Olympia, en 1997, le violoniste hollandais fait aujourd'hui partie des poids lourds du show-biz.  Chaque année, plus de 600.000 fans européens et américains paient 300 francs pour assister à l'un de ses 110 spectacles.

 

Il engrange 1 million de
recettes par show

Le violoniste ne retournera pas à l'Olympia: trop petit. Les frais d'organisation et les décors de son spectacle (18.000 francs le lustre, 24.000 francs le costume...) le contraignent à remplir des salles accueillant au moins 4.000 personnes pour faire des bénéfices. La recette de chaque show (partagée avec l'organisation) dépasse 1 million de francs.

 

Né à Maastricht voilà cinquante et un ans, André Rieu, qui porte le nom d'un ancêtre auvergnat, a vendu 11 millions de CD depuis son premier opus, sorti en 1994.  Pourtant, André et son grand orchestre ne passent pas à la radio, ni sur MTV.Son répertoire (à dominante valses) et les tenues de scène kitsch de son orchestre font hurler les mélomanes. «André Rieu séduit un public qui aime la musique classique, mais pas son côté solennel.  Son coeur de cible, ce sont les plus de 40 ans, qui n'ont aucune vedette à qui s'identifier», résume Yann Ollivier, directeur général d'Universal Classic France, qui réalise 15% de son chiffre d'affaires avec le romantique Batave. «Le phénomène n'est pas nouveau, analyse Georges Gad, journaliste au "Monde de la musique".  L'Orchestre de Budapest, par exemple, interprète à chaque Noël des morceaux de Strauss à la salle Pleyel.» Oui, mais seul Rieu a su transformer cet engouement populaire en une industrie très lucrative. Selon nos estimations, ses recettes atteignent plus de 100 millions par an. Ses bénéfices ?  Top Secret. Mais certains ont déjà tenté d’évaluer son patrimoine. Un journaliste néerlandais, spécialiste du sujet, l’estime à 120 millions de francs.

La clé de sa réussite ?  Un contrôle absolu sur le produit (concert, disques,…) et l’élimination des intermédiaires. L’ex-premier prix du Conservatoire Royal de Belgique est ainsi son propre producteur et son propre manager. Mieux, le Rieu’s Tour est propriétaire des décors et costumes nécessaire aux représentations et des cinq bus et deux jets qui servent à ses déplacement. « Avec l’argent que je gagne, j’achète tout le matériel dont j’ai besoin et je le loue à d’autres artistes, explique le violoniste dans un français parfait. C’est plus rentable » Son empire se compose de treize sociétés, une pour chaque facette de son business (production, publicité, merchandising,…)Elles emploient 120 salariés à plein-temps, dont une quarantaine de musiciens et autant de techniciens, tous équipés d’un téléphone portable offert par la maison. Mais elles n’ont qu’un seul véritable patron. « Je garde un oeil sur tout », affirme André Rieu.

 

Il collectionne les
disques de platine

Vendus chacun à plus de 1 million d'exemplaires, tous les albums d'André Rieu depuis "Valses" sorti en 1994 jusqu'au récent "La Vie est Belle", ont été couronnés de plusiEurs disques de platine. Soit, selon nos estimations, une recette moyenne de 30 millions de francs par disque. Le pourcentage touché par l'artiste sur le prix de vente (hors taxes) des disques atteidrait, selon les professionnels, 25%.

 

Pourtant, pendant longtemps, aucune maison de disques n’a voulu des valses de ce gaillard toujours bronzé, que les américains comparent à Mel Gibson. Si les tournées ont démarré dès 1978, il a fallu attendre le début des années 90 pour que la filiale hollandaise d’Universal, impressionnée par le succès de ses concerts, le fasse signer. Jack-pot !  Le premier album s’est vendu à 800.000 exemplaires au pays des tulipes.

Depuis, André Rieu a conquis l’Allemagne et la France. Grâce à un de ces coups de marketing dont il a le secret…et dont on se souvient encore à la CNP (Caisse nationale de prévoyance) : en 1993, l’assureur a utilisé une valse du compositeur russe Chostakovitch pour sa pub télévisée. Enorme succès, pour le spot comme pour la musique. Quelques mois plus tard, Rieu a repris le morceau. « Depuis, beaucoup de gens pensent qu’il a composé lui-même cette volse… », constate aujourd’hui, un peu dépité, Valérie Boissier, responsable des campagnes de l’assureur. En 1995, à la mi-temps d’un match de football opposant, à Amsterdam, l’Ajax au Bayern de Munich, André le violoniste fera même tanguer 60000 supporters en délire sur cet air.

 

Il vend ses produits
dérivés sur Internet

Sa biographie, écrite par sa femme Marjorie, vaut 300 francs, ses portraits encadrés 400 francs, ses statuettes 5000 francs, ses bijoux en forme de violon 450 francs ... Tous ces produits sont vendus lors de ses concerts et sur Internet.
Les recettes du site de Rieu, ouvert fin décembre, dépassent déjà 120.000 francs par mois.

 

Chaque année en juin, Rieu s’enferme avec ses musiciens et son Stradivarius à 7 millions de francs (toujours surveillé par un garde du corps) pour enregistré un CD. Le répertoire ne change guère : des mélodies classiques ultraconnues et quelques chansons populaires (« Ramona » « Tea for Two »…).

Tous les morceaux sont réorchestrés, afin d’être accessibles au plus larges public. Au passage, le violoniste ajoute ainsi à ses royalties d’interprète celles qui rémunèrent les arrangeurs. Epaulé par son frère cadet Jean-Philippe, 44 ans, chef d’orchestre de formation, il a aussi composé le titre phare de son dernier disque, « La Vie est Belle », s’octroyant ainsi un petit pourcentage supplémentaire sur les ventes.

 

Il s'offre un studio à
30 millions de francs

A Maastricht, André Rieu s'est fait construire le plus moderne
et le plus grand (18 mètres sous plafond) studio privé d'Europe. Inauguration en mai. L'artiste a déjà projeté de le louer à d'autres interprètes pour amortir l'investissement.

 

Chaque nouvel album s’accompagne de la sortie d’une cassette vidéo « live » tournée lors d’un concert par Jean-Philippe, grâce à vingt caméras numériques. Monté et mixé en interne, ce film se vend à plus de 50000 exemplaires, via un réseau contrôlé par André Rieu. L’artiste est en effet l’unique distributeur de ses produits dérivés, que les groupies s’arrachent lors des concerts ou commandent à l’adresse Internet www.andrerieu.com, lancée en décembre. « Nous avons investi plus de 5 millions de francs pour ce site, indique le responsable Internet, Ron Schoenmakers. Nous comptons le rentabilisé en deux ans, en attirant 2000 visiteurs par jour.».

A ce rythme, le violoniste en or ne risque-t-il pas d’épuiser le filon ? « Rieu est un grand professionnel. Les gens qui viennent le voir en ont pour leur argent. C’est pour cela qu’ils reviennent », répond Gérard Louvin, patron de Glem et producteur à succès.

A tel point qu’André Rieu poursuit désormais un autre rêve : s’introduire en Bourse.

 

Il s'offre deux avions
et un château
.

Propriétaire de deux avions (un Fokker de 50 places et un Cessna Citation), André Rieu a logé les sièges sociaux de ses 13 sociétés dans son hâteau du XVème siècle.

 Paru dans: Capital - mars 2001